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Le parfum de la terre, humide et étrange, imprégnait mes sens dès l'aube.  Je me souviens de ce matin, il y a si longtemps, où le soleil, un disque d'or brûlant, peignait de rouge sang les murs de la maison familiale, à Rivel.  J'étais Moune, une fleur fragile, se dressant au milieu d'un jardin trop souvent étouffé par les contraintes de la vie rurale.  Une vie qui murmurait, sournoisement, des histoires de devoir et de conformité, d'honneur et de silence.

Mais en moi, une autre voix chuchottait, une voix plus intense, plus impétueuse, plus… féminine.  Elle parlait d'émotions bouillonnantes, de sensations inconnues, de désirs qui défiaient les limites du raisonnable.  J'étais une énigme, un vase brisé, rassemblant des fragments d'émotions qui se déversaient en une cascade colorée.

Les livres, ces miroirs éphémères, me permettaient d'explorer des univers inconnus.  Des jardins secrets, des labyrinthes d'émotions.  Des figures féminines, dans les romans, dans les poèmes, prenaient vie, des femmes qui osaient, qui se révoltaient, qui se déchaînaient dans une danse sauvage et irrésistible.  J'étais fascinée par leur audace, leur liberté.  Mais à quoi bon rêver, lorsque la réalité était si pesante, si morcelée?

Mon esprit, un oiseau captif, s'échappait dans les pages, dans les entrelacs des phrases, dans les mots.  Il s'aventurait dans les méandres de mon propre cœur, où se croisaient la peur et la passion.  Il cherchait des refuges, des échappatoires.  Et il les trouva dans les bras d'un homme, un homme qui comprenait, qui acceptait, qui me révélait des aspects de moi-même que je n'avais jamais imaginés.

Un jour, dans une petite auberge, au coin d'une rue inconnue, nous nous sommes retrouvés.  Le temps s'est arrêté.  L'air, chargé de mystère et de désir, s'est enflammé.  Le silence, épais et lourd, a cédé la place à un murmure, un concert d'émotions.  L'endroit, un lieu étrange et doux, au fond d'une cour recouverte d'une végétation luxuriante, était à la fois familier et inconnu.  Comme un rêve, une vision, une explosion de sensations qui s'épanouissaient dans le noir.  L'amour, un feu sacré, embrasait notre être, un feu qui allait brûler dans les ténèbres de nos nuits.

Je me suis retrouvée dans un univers nouveau, où les frontières s'effaçaient, où l'intime se dévoilait dans toute sa splendeur.  Les mots, les images, les sensations, se sont entrelacés pour créer une symphonie unique, une œuvre d'art inachevée, un témoignage de mon existence.  Et, au milieu de ce chaos magnifique, j'ai appris à m'accepter, à me comprendre, à vivre pleinement, même dans les ombres.  Car c'est dans ces ombres que la lumière prend toute sa force. 

Muni

Muriel Baptiste